Interview David - PIN'S AND NEEDLES

18 Février 2008
 
 

Cette interview a été réalisé à Vienne.
O.S. a renconté
David.


J’ai rencontré David il n'y pas longtemps, l'été dernier, tatoueur sur Vienne, calme et posé, je me devais d'interviewver ce personnage modeste, simple et tranquille, et se fut l’occasion en se 18 février 2008 d'en savoir un peu plus sur son travail.

Quand et comment as-tu découvert le tatouage ? Qu'est ce qui t'as motivé à faire ce métier ?

Et bien découvert dès que j'ai pu marcher, et aller me camoufler dans le lit de mes parents, donc sur mon père, donc après c'est le cercle vicieux, tu vois une fois, deux fois, et après tous les matins tu es impatient de te lever, pour aller regarder pendant que le père il dort se qui a sur la peau. Après tu apprends à parler et tu apprends à dire " c'est quoi papa ?" et tu apprends aussi ce que ça veut dire " Dégages, laisses moi tranquille !! ". (Rires collectif)
Et bien du coup, c'est un peu, pas le cercle vicieux, mais tu as envie de savoir, c'est la curiosité, tu ne sais pas vraiment que ça peut exister ce genre de métier, mais au final je ne sais pas, depuis que j'ai 2-3 ans c'est ce que je veux faire.

Attends tu savais déjà, si jeune ???

Inconsciemment c'est ce que je voulais faire, ce que je voulais porter, ce que je voulais plus ou moins faire, tu t'imagines pleins de trucs. Et du coup sans savoir que ça puisse vraiment exister, ouai c'est ce que je voulais faire. En grandissant et en s'affirmant t'arrive à persister, trouver du matériel. J'ai commencé après à me faire tatouer à 20 ans et ça a vraiment était là le déclique pour se lancer.

Tu as commencé vraiment à tatouer quand et comment ?

J'ai commencé en 2001, en fait d'abord j'ai commencé à 13 ans sur les bancs de l'école avec les aiguilles à coudre à maman et les conseils de papa.

A l'encre de chine.. ??

Ouai, ouai, à la Pélican, après ça ma passé, mais du coup j'ai commencé chez Couleur trip aux Terreaux (Lyon 01) en 2001, petite formation de 3 ans. Après j'ai eu envie de m'envoler seul et ça va faire cinq ans cet été que je suis sur Vienne.

Tu bosses à Vienne, loin de l'agitation de Lyon et des nombreuses boutiques. Est-ce que cette situation géographique te donne plus de libertés ou est contraignante ?

Il y a des deux. Beaucoup plus de liberté… enfin je ne sais pas si on peu appeler ça de la liberté, mais c'est bien car j'ai un autre rythme où tu n'as pas le 100 à l'heure de la ville, je peux bosser vraiment comme j'en ai envie, à ma sauce et tout, c'est un challenge aussi parce qu'il faut lancer, provoquer la demande, il n'y a que ton travail qui paie. Tu sais j'ai commencé vraiment à zéro ici, je ne connaissais personnes, et en même temps la stimulation Lyonnaise tatoueurs, les populations, ça me manque énormément moi aussi quand même, parce qu'au final on tourne un petit peu en rond. Il n'y a pas la stimulation des potes, où le soir tu te vois un verre " putain aujourd'hui j'ai fais ça… ". Mais voilà, bon ce n'est pas très loin non plus.

Si on parle de ton travail, as-tu un style particulier où un que tu préféré ?

Oui, carrément, j'aime bien le noir et gris, la couleur, le noir aussi, mais j'essaie de développer le bio, on va dire que ça se catégorise de plus en plus dans du bio, voilà c'est ce que je kiffe le plus, abstrait, avec beaucoup de volumes, de 3D, couleur ou noir et blanc ça n'a aucunes importance, c'est au goût de chacun.

Tu as des inspirations particulaires, moi, de ce que j'ai vu, je pense à H.R. Giger ou Philippe Druillet ?

Ouai, voilà, M.C. Escher beaucoup.

Oui… c'est un autre délire…

Oui, c'est un autre délire, mais on y est aussi, c'est à la fois mathématique et visuel.

Et, l'abstrait comme cela, c'est des gens qui t'amènent des dessins, où c'est des gens qui te laissent faire ?

C'est rare les gens qui t'apportent, en général c'est sur accord, c'est des gens qui te laissent faire en règle général, où tu fais tout. C'est le gros de notre métier, moi, quand mes machines fonctionnent je suis heureux, j'ai du boulot, je fais de tout, sauf un ou deux motifs particuliers que je ne fais pas, mais sinon, on me demande de tout, je fais de tout, ça permet aussi de ne pas s'enfermer dans un style, une routine, sinon t'as vite fais le tour.
Le but c'est de se satisfaire et satisfaire les gens. Si une personne rentre et me dis je veux ça, j'ai intérêt à le faire comme si c'était moi qui allait le porter pour la réalisation, donner 100% de moi-même, et en même temps je ne peux pas me permettre de juger les gens, je ne les connais pas leurs vies, si il veulent porter tel ou tel tatouage, c'est qu'ils ont une bonnes raison de le faire, t'aimes ou tu n'aimes pas… Nous on est là pour les satisfaire aussi. C'est 50/50, il faut être content de ce que tu fais, enfin, prendre du plaisir à faire ce que l'on fait, si il n'y pas de plaisir, il ne faut pas le faire, mais par contre il faut les satisfaire, eux avant tout.


Que pourrais-tu refuser comme tatous, les deux motifs particuliers ?

Bin en faite, je ne fais pas de dragons du tout, parce que je n'y arrive pas, et surtout je n'aime pas du tout (rire).

Tu n'aimes pas les dragons (rire) ?

Non je n'aime pas les dragons, je n'y arrive pas, c'est une catastrophe, donc je n'en fais pas.

Mais c'est un type de dragons particuliers, très spécifiques, les dragons chinois par exemple ?

Je ne fais aucuns dragons. Mais je le dis clairement, quand on me demande, je suis honnête, je dis je ne fais pas parce que j'y arrive pas, je ne kiffe pas, ce n'est pas mon trip, donc je ne fais pas et je renvoie vers des collègues.

C'est le seul animal, ou il y en a d'autres ??

Je n'aime pas les morpions non plus, mais ça on ne le fait pas trop (rire collectif).


Pratiques-tu d'autres formes d'art, dessins, peinture ?

Non, pas vraiment, je ne crois pas, j'ai fais un peu de dessins chez moi, on ne peut pas appeler ça de la peinture.

Mais quand tu dois faire une commande, c'est du dessin au départ que tu fais ?

Ouai, c'est sûr, mais je ne fais pas de peintures à proprement parler, mais j'ai fais pas mal de " toiles " avec les moyens du bord, un styla a bille, un marqueur et de la mine de plomb, mais ça reste un résultat bien particulier.


CONVENTIONS : en fais-tu beaucoup ?
Comment les perçois-tu ? (avantages / inconvénients)

Alors beaucoup plus d'inconvénients, je n'en fais plus, la dernière fois que j'en ai fait une, c'était à Dijon au mois d'Octobre. Je n'en fais plus car au niveau de l'hygiène ce n'est pas du tout ça, c'est un peu trop " tatouage camping ", donc c'est moyen. En même temps, aller faire sa publicité, être présent sur un événement comme ça, que ce soit à Dijon, Paris, Strasbourg, Marseille, c'est absurde ça ne rime à rien du tout, ma publicité c'est ici qu'il faut que je la fasse. Tu n'as aucunes retombées, tu ne travailles quasiment pas ou de moins en moins, c'est à perte en fait.
Le seul truc bien, c'est que tu rencontres des gens sympas, tu échanges des trucs avec d'autres tatoueurs de toutes la France, de Belgique, mais au final ce n'est plus mon truc du tout, si j'y vais c'est en visiteur.

De quels tatoueurs te sens-tu donc le plus proche ? Pas forcément dans le style mais peut-être plus au niveau état d'esprit…

Alors en fait, on ne peut pas dire aucuns, tu as toujours de l'inspiration de l'un ou de l'autre, c'est un truc perpétuel qui se régénère sans arrêt parce que tu prends des influences. Moi j'essais d'être moi-même à 100%, je ne veux pas être untel ou untel, je n'essaie pas d'être bon imitateur, j'essaie vraiment d'être moi-même en fait.

Sur le bio, dont on parlait précédemment, voix-tu quelqu'un qui t'intéresse en tant que tatoueur ?

Ouai, il y a un mec qui s'appel Rob Koss qui vit au fin fond de la suisse allemande, qui fait du super bon boulot, ça déchire grave.

Dans ce délire là, peut-être plus en couleur, plus abstrait coloré, j'aime Aitchison…

Ouai, Aitchison, ouai carrément, c'est une référence aussi. Mais ce genre de personne je ne préfère pas voir leurs tafs car ça m'influence du coup, et cela fausse mon parcours quelque part, parce que c'est du super bon boulot c'est clair, je suis obligé d'aller voir de temps en temps, ou j'ai des bouquins.
Mais le fait d'aller trop regarder ou d'être trop intéressé par ça, ça va me fausser, ce que je développe.

Aux niveaux influences toujours, je sais que c'est souvent inconscient, mais est-ce qu'il y a des choses qui t'influence, en musique, films…etc ?

La musique oui, ça m'influence beaucoup. Les Deftones m'influencent énormément, une musique bien comme il faut.

Et, tatouer un membre des Deftones ça serait un de tes kiffs ?
Sur scène bien sur pendant le concert !!(rires)

A ouai, sinon ça vaut pas le coup !! (Rires collectifs)
Oui tatouer un membre des Deftones ça serait sympa…


Donc d'après toi, il ya un lien entre la musique et le tatouage ?

Oui, (il me montre le câble de la machine et plus précisément le jake)
Le jake, et puis ça fait du son quand même, il y a pleins de mecs qui ont samplé des machines à tatouer à la fin des albums.

Et dans ta clientèle, as-tu beaucoup de gens venant du milieu de la musique ?

Ouai, il y en a beaucoup.

Comment perçois-tu l'évolution du tatouage, l'effet de mode, plutôt positif ou négatif ?

Honnêtement il n'y a pas trop d'effets de mode ici. Il y a peu de gens qui viennent en me demandant des trucs de mode, contrairement à Lyon. C'est ce qui est regrettable à Lyon, ou Paris qui vivent beaucoup sur les effets de mode du coup. On est plus réfléchis, ici, on est en peu plus en retrait, pas en retard mais le fait d'être plus en retrait fait qu'il y a moins d'effets tendances comme dans les grandes villes.
Sinon l'évolution du tatouage en cinq ans, le niveau Français a vraiment bien évolué, il y a eu pleins d'efforts et de progressions de la part de tout le monde.
Et c'est bien, même si on est encore bien en retard vis-à-vis de pleins d'autres pays qui nous mettent une dérouillé, mais alors laisse tomber, les pays de l'Est et États-Unis. Les mecs là-bas, ils sont fort, déjà la Suisse ils sont vraiment forts.

Je pense aussi qu'ils ont déjà la culture, comme dans les pays du nord ?

Oui, carrément, il y a une autre culture où les gens, ils se font tatouer de la tête au pied comme nous on va chez le coiffeur, " bonjour, je voudrais un bras ? Ok ". Chez nous ça mettra du temps.

Chez nous, les pouvoirs publiques essaient de légaliser la chose, tu as des infos là-dessus ?

C'est en cours, il y a des choses qui vont se mettre en place. Ca va éviter le travail sauvage, ça va nous réglementer un peu plus, même si on l'est déjà plus ou moins. Il a déjà une réglementation qui est interne, la plus part des tatoueurs et perceurs pros, on bosse déjà avec certaines conditions d'hygiène, lavage de mains, tels matériel où tels matériels. Notre métier a instauré ça, on c'est auto-réglementé.
Au départ c'est le syndicat national des tatoueurs professionnels de Tintin, c'est eux qui sont allés voir le ministère de la santé, pour leur dire : " voilà, nous on travail comme ça, on voudrait bien déjà être reconnut car ce n'est pas le cas, avoir tels choses et tels choses, les TVAs et pleins d'autres choses… ". Actuellement si tu as une carte d'identité, demain tu peux être tatoueur, ils privilégient les contrôles fiscaux aux contrôles sanitaires, et du coup… après on va où ? Au niveau hygiène, rien ne m'oblige actuellement à avoir une salle de stérilisation, il n'y a que de la recommandation, mais personne vient voir quoi que se soit, si tu es bien équipé ou pas…
Il faut que l'on soit un métier reconnut et là, ce n'est pas le cas.

Tu penses qu'une reconnaissance légale va faire évoluer les mentalités sur le tatouage ?

Ca va d'abord faire un tri, il y a certainement pleins de personne superficielle qui n'ont rien à faire dans ce métier, qui vont devoir arrêter, qui sont là pour l'aspect financier et qui ne vont pas pouvoir suivre financièrement les réglementations. C'est sûrement un mal pour un bien. Il restera tous les gens qui ont le niveau techniques et financier vis-à-vis de ce réclamera la clientèle.

Qu'est-ce que dire pour inciter les gens à venir chez toi plutôt qu'ailleurs ?

Je ne sais pas… Qu'est-ce que je dirais aux gens… que le but de mon action quand même c'est vivre, bien sur, mais c'est surtout de prendre du plaisir à leur faire un tatouage, voilà.

La question de fin , dite " Santagore " hommage a un confrère qui c'est arrêté il y a quelques mois : " Quelle est la question que tu aurais aimé que je te pose et que je ne t'ai pas posé ? "

Que tu me demande si ça va ?

Et alors, ça va ?

Super !!


Questionnaire of Pivot :

Quel est ton mot préféré ? Aih !!
Quel mot détestes-tu ? Estafette
Qu'est ce qui te rend créatif ? La musique et la créativité.
Qu'est ce qui te rend spirituel ? Je ne sais pas du tout.
Qu'est ce qui t'énerve ? Pas grand-chose.
Ton injure préférée ? Ca doit être putain.
Le bruit ou le son que tu aimes ? Le bruit de la machine qui tourne.
Le bruit ou le son que tu détestes ? La machine à laver ou l'aspirateur.
Quel est ton lieu préféré sur terre ? Ici
Le lieu que tu détestes ? Je ne crois pas qu'il y en ait un.
Quelle personne t'a le plus influencé dans ta vie ? Certainement mes parents.
Enfant quels étaient tes héros ? Ca devait être un Playmobile.
Lequel ? Ca c'est une bonne question ?
Quelle profession aurais-tu voulu faire, en dehors de la tienne ? Dentiste.
Quelle profession n'aurais-tu pas voulu faire ? Policier ou pompier, trop strict pas assez souple.
Si Dieu existe que voudrais-tu qu'il te dise à ton arrivé au paradis ? Qu'il me dise pardon, par ce que si Dieu existe je pense que je lui en voudrais.

Interview O.S.



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